L’origine des sentiments de culpabilité, un regard psychanalytique

Voici le texte de Pierre Paduart, présenté lors de notre séminaire du 29/09/2016

 

Pierre PADUART

L’origine des sentiments de culpabilité, un regard psychanalytique

 

(A.R.P.P. – 28/09/2016)

 

 

Les sentiments de culpabilité ont de multiples traductions cliniques :

 

  • Délire de surveillance paranoïaque ;
  • Masochisme intense et échecs répétés des « névroses » d’échec ;
  • Sacrifice permanent et réparation obsédante de certains soignants (infirmières, mère Teresa,…) ;
  • Crimes commis par sentiment de culpabilité ;
  • Réactions thérapeutiques négatives.

 

Ce travail s’intéresse surtout à l’origine des sentiments de culpabilité.

 

 

  1. « Le crime, c’est la pulsion, le désir, le fantasme » (S. Freud et M. Klein)

 

On voit bien dans ses écrits anthropologiques que, pour Freud, la civilisation est bâtie sur un sentiment de culpabilité.

Dans « Totem et Tabou » (1912 – 1913), les frères sont coupables d’avoir tué le père de la horde primitive et la civilisation est construite sur l’interdit du parricide et de l’inceste.

Dans « Malaise dans la culture » (1929), le danger pour la société est la destructivité, la pulsion de mort ; le crime est toujours lié à la pulsion, cette fois la pulsion de mort et les fantasmes destructeurs.

 

Néanmoins, même après l’introduction de la pulsion de mort, des analyses ultérieures effectuées par Freud (Anna G. ou Abraham Kardiner) montrent qu’il conservait un caractère organisateur central au conflit œdipien et nous allons évoquer 5 vignettes cliniques où le crime est OEDIPIEN :

 

  1. Un jeune homme de 14 ans, régulièrement vaincu au tennis par son père, découvre que, pour la première fois, il est en mesure de le vaincre. Il éprouve un malaise, se met à mal jouer et perd le match qu’il semblait devoir remporter !

 

  1. Une jeune fille de 14 ans, très proche de son père, est confrontée à un « breakdown » psychiatrique de sa mère ;

Ses règles disparaissent et elle devient habitée par une angoisse terrible, avec des fantasmes de suicide.

La thérapie révélera une culpabilité œdipienne intense, liée au « breakdown » de sa mère et permettra la réapparition des règles.

 

  1. Un homme de 70 ans présente un adénome prostatique modéré avec une nycturie légère. Sa nycturie s’intensifie nettement, il est angoissé et désire intensément qu’on lui enlève la prostate !  Son urologue constate que la prostate n’a pas augmenté de volume et qu’il n’y a aucune indication de prostatectomie.  Cet homme, en psychothérapie, comprend alors que 70 ans, c’était l’âge du décès de son père et que son crime est de vivre plus vieux que lui !  La nycturie se calme et tout rentre dans l’ordre.

 

  1. Une jeune femme en analyse, organisée sur un mode essentiellement névrotique œdipien, tombe amoureuse de son analyste (masculin). Elle s’en sent de plus en plus coupable et évoque de multiples raisons d’arrêter cette analyse.  Elle redoute que l’épouse de l’analyste ne fasse irruption dans le bureau et interrompe la séance.  De plus, elle rêve qu’une chirurgienne sadique veut lui enlever les ovaires.

 

  1. Un homme en analyse imagine que la femme de son analyste se trouve à l’étage supérieur et a le fantasme d’y aller la retrouver. Il avoue son fantasme avec angoisse et culpabilité et rêve d’un analyste boucher qui ampute les membres de ses patients !

 

Comme l’a fait remarquer Michèle Van Lysebeth (« Complexités d’Œdipe »), la culpabilité œdipienne a, chez Freud, une tonalité beaucoup plus paranoïde que dépressive.  Les accents dépressifs de souci pour le rival n’y sont cependant pas absents (voir le souci du Petit Hans pour son père, par exemple).

 

Freud évoque aussi une culpabilité liée au sadisme ANAL (même si celui-ci est conçu essentiellement comme une régression devant l’Œdipe).

L’homme aux Rats, se sentant coupable de désirs très sadiques envers son père, redoute que l’on ne lise dans ses pensées et a des rituels obsédants pour annuler son crime et effacer sa culpabilité.

 

Freud enfin, dans « Quelques types de caractère dégagés par le travail analytique » (1916), évoque l’existence de crimes commis par un sentiment de culpabilité inconscient.

 

Il y a donc une culpabilité antérieure, plus primitive, et le sujet commet ensuite un délit, pour se donner une explication à son sentiment de culpabilité et pour s’en soulager en se faisant punir.

 

Reste alors à comprendre l’origine de ce sentiment plus primitif de culpabilité, et nous devrons nous tourner vers Mélanie Klein et Winnicott pour trouver des réponses.

 

 

Pour Freud, le conflit central est le conflit œdipien du garçon avec son père, la relation avec la mère semblant essentiellement idyllique.

C’est Karl ABRAHAM qui attire l’attention sur des conflits et une culpabilité plus précoces, liés à une haine primitive, « préœdipienne », envers la mère.  L’œuvre de Karl Abraham sera un point de départ pour les travaux de Mélanie Klein.

 

Pour Mélanie KLEIN comme pour Freud, la pulsion est au centre de sa vision métapsychologique et la culpabilité est liée à la Pulsion : pulsion de mort sous ses formes diverses (envie, cannibalisme, sadisme oral, anal, urétral, attaques œdipiennes précoces contre le coït parental ou contre les bébés dans le ventre de la mère).

 

A la position schizoparanoïde (où la pulsion de mort entraîne une terreur paranoïde du mauvais objet), succède la position dépressive, avec une angoisse dépressive, une culpabilité avec des désirs de réparation.

 

Freud est donc resté fort centré sur l’angoisse de castration et sur un sentiment de culpabilité paranoïde, la peur du gendarme œdipien.

 

Mélanie Klein (Winnicott après elle) mettra l’accent sur l’inquiétude envers l’objet attaqué (angoisse dépressive) et le désir de le réparer.

 

Un patient obsessionnel m’avait toujours payé exactement durant son analyse.  A partir de la décision de mettre fin à celle-ci, il s’est mis régulièrement à se tromper et à me payer des montants excessifs.

L’analyse a montré un intense désir de réparation consécutif à son inquiétude et sa culpabilité d’abandonner son analyste.

 

 

 

  1. Culpabilité et Environnement

(Ferenczi, Winnicott, Roussillon…)

 

Freud et M. Klein mettent l’accent principal sur la Pulsion, le Désir, le Fantasme.

Otto Kernberg, influencé par le Kleinisme, et parfois Bion évoquent aussi l’importance d’une agressivité innée trop intense.

 

On comprend cependant beaucoup mieux la genèse de sentiments excessifs de culpabilité si l’on tient compte de sentiments excessifs de culpabilité si l’on tient compte de l’environnement, de l’objet et de ses particularités psychiques, de la famille, de l’histoire avec ses éventuels traumatismes.

 

Mélanie Klein, dans un texte de 1927 consacré à un enfant délinquant de 12 ans, s’attarde longuement sur l’importance excessive du sadisme oral et anal de cet enfant.

 

Passent presque au second plan les faits que :

  • Le père est mort ;
  • La mère, malade, meurt également ;
  • La sœur aînée est haineuse et commet des agressions sexuelles sur le patient !

 

  • Conflit oedipien et environnement:

 

Le conflit œdipien se négocie d’une manière qui dépend

 

  • Des objets, de la configuration œdipienne du couple parental et de la famille

 

  • D’éventuels événements traumatiques dans l’histoire du sujet. Parfois, le trauma est évident et bruyant (la mort ou le divorce du couple parental par exemple), parfois le traumatisme est beaucoup plus insidieux, plus silencieux (constellation familiale pathologique).  On pense ici au concept de « trauma cumulatif » de Masud Khan ou bien aux descriptions cliniques d’Harold Searles.

 

Deux vignettes cliniques de perturbation œdipienne dans le couple parental :

 

  1. Un jeune homme de 25 ans présente de l’inhibition et une angoisse devant toute éventualité amoureuse ou érotique. Il fonctionne sur un mode névrotique œdipien prévalent.

Il est fils unique d’une mère qui en a fait son Dieu et d’un père modeste et effacé.  L’appartement est rempli de photos de ce fils déifié et la mère souligne devant lui les multiples échecs professionnels du père.

L’analyse dévoilera une culpabilité œdipienne intense liée à la conviction d’avoir détérioré le père.

 

  1. Une femme de 35 ans, en analyse, présente des difficultés œdipiennes évidentes. Elle est également l’enfant unique d’un père qui l’adore, ne peut lui refuser et d’une mère elle-même sujette à des accès de jalousie œdipienne dans le trio familial.  La fragilité œdipienne de la mère donne matérialité aux fantasmes de triomphe œdipien de la fille.

 

  • Difficultés œdipiennes consécutives à un évènement traumatique évident:

 

  1. Une jeune fille de 14 ans, excessivement liée à son père, développe une angoisse et une culpabilité intense suite à l’effondrement dépressif de sa mère.

Encore une fois l’événement extérieur donne matérialité au fantasme de triomphe œdipien.

 

  1. Un adolescent, dans une problématique œdipienne classique face à ses parents et grand amateur de football, voit à la télévision un joueur s’effondrer victime d’une crise cardiaque. Il devient très angoissé et refuse de jouer encore au football.  Il est très inhibé devant les filles et craint d’attraper un incident cardiaque.

 

Le traumatisme peut également survenir dans un contexte de rivalité fraternelle : une petite fille de 4 ans est très jalouse parce que sa mère attend un bébé.  La mère fait une fausse couche et, peu après, la petite fille s’ébouillante la cuisse.

Beaucoup plus tard, en analyse, elle s’interrogera sur une culpabilité éventuelle, consécutive à la fausse couche maternelle.

 

 

Il faut souligner l’aspect très désorganisateur des coïncidences entre fantasme et évènement  traumatique réel ou entre deux évènements :

 

Une jeune fille présente un masochisme intense, un besoin intense de se sacrifier pour les autres et de se faire punir.  Elle a eu un père gravement alcoolique et, dans son enfance, on lui a dit que l’alcoolisme paternel avait débuté à sa naissance ! Dans son omnipotence infantile, elle a admis sa responsabilité dans l’alcoolisme du père et, coupable, passe sa vie à essayer d’expier le crime et de réparer l’objet endommagé.

 

  • Culpabilité issue de traumas à la phase ANALE:

 

Rappelons que la phase anale est faite de conflits liés à la défécation, à la propreté, à la mobilité et à l’autonomie.

En découlent des attitudes d’obéissance, de soumission, de docilité, de conformisme, de rétention, d’opposition plus ou moins ouverte (parfois passive) et de la culpabilité.

 

Se jouent alors la souplesse, la capacité de négocier et de faire des compromis.

 

Des parents autoritaires, rigides, exigeant une obéissance totale et immédiate entraînent une confusion entre la perte d’une partie (le renoncement à une partie) et la perte de TOUT.

Les enjeux de pouvoir, les enjeux narcissiques sont donc sollicités très fortement.

 

Par identification à l’agresseur (leurs propres parents) et mus par un Surmoi sadique anal, les parents ont tendance à imposer à leurs enfants ce qu’ils ont subi :

 

  • L’enfant doit ABSOLUMENT tout manger, il doit aller aux toilettes selon un rythme imposé. On ne tolérera aucun désordre, aucun bruit, aucun excès de vitalité ou de plaisir.

Selon certains parents rigides, le plaisir ce n’est qu’une pause afin de pouvoir travailler mieux, le vélo c’est bon pour la santé et l’on apprend à nager pour ne pas se noyer !

  • Voir à ce propos :
    • Un article de Maurice Berger sur l’analité et le Surmoi (« Cahiers de Psychologie clinique » n° 7)
    • Les réflexions de Theodor ADORNO sur la personnalité autoritaire
    • « Les désarrois de l’élève Törless » de Robert MUSIL

 

  • L’OBJET, élargissement du propos:

 

Deux questions doivent être posées à propos de l’objet :

 

  1. Qu’est-ce qu’il ne supporte pas?
  2. Comment réagit-il à ce qu’il ne supporte pas ?

 

  1. Il y a des tas d’aspects non supportés, aspects ici déliés, séparés pour la clarté de l’exposé :

 

  • L’existence de l’enfant (un enfant non désiré sera rongé d’une culpabilité existentielle, avec le sentiment perpétuel de déranger, de ne pas mériter sa place, de devoir se faire pardonner d’être là) ;

 

  • La vitalité, la pulsionnalité 

Par culpabilité, l’enfant sera hypercalme, hypersage, entravé dans son épanouissement ;

 

  • L’avidité normale de l’enfant, profondément culpabilisée si elle l’a été chez les parents ;

 

  • La différence et l’altérité. L’enfant DOIT penser et éprouver COMME ses parents ;

 

  • L’autonomie, l’individuation

Certaines mères ne tolérant pas l’autonomie induisent chez l’enfant une intense culpabilité de séparation ;

 

  • Le succès, la réussite

Certains parents, envieux, inhibent et culpabilisent toute réussite, ce qui entraîne des « névroses » d’échec ou de destinée ;

 

  • La curiosité (pulsion épistémophilique) : les enfants ne pourront alors devenir des prix Nobel d’astronomie ou de biologie moléculaire !

 

  • L’originalité, le désordre, l’insoumission

(cf. plus haut, les conflits liés à l’analité) ;

 

  • La dépendance de l’enfant

Celui-ci va se vivre comme pesant, encombrant, demandant trop et étouffera, par souci de ne pas de faire rejeter, ses besoins légitimes de dépendance.

 

Les conflits d’autonomie sont vécus essentiellement à la période anale (cf. supra) et à l’adolescence (cf. les études du psychanalyste familial Helm Stierlin sur les adolescents qui se suicident par culpabilité de séparation – « breakaway guilt »).

 

  1. Comment REAGIT l’objet à ce qu’il ne supporte pas ?

 

Deux réponses, en gros, sont possibles :

 

Soit a) le rejet, la punition, la colère voire le sadisme, le retrait d’amour

 

Soit b) au contraire, une réaction dépressive, un mal être et des plaintes

 

  1. Dans la première éventualité (punition, rejet, retrait d’amour), l’enfant ressentira une culpabilité paranoïde, une peur du rejet, du désamour, une angoisse de punition, de castration ou d’abandon.

Si l’enfant éprouve de la rage, celle-ci intensifiera son sentiment de culpabilité et sera éventuellement retournée contre lui ;

 

  1. Dans la deuxième éventualité, dépression, mal être, plaintes du parent (voire envie) vont éveiller chez l’enfant de la culpabilité dépressive, une angoisse d’avoir endommagé l’objet, avec des désirs de réanimer ou de réparer l’objet.

 

Il est très important que l’objet se montre sensible, réceptif à ces mouvements de réparation, ce qui diminuera la culpabilité de l’enfant et lui donnera confiance dans sa bonté, sa non-destructivité et ses capacités de réparation.

Au contraire, si l’objet reste déprimé ou abîmé, l’enfant va sombrer dans une culpabilité dépressive insurmontable et dans le désespoir d’avoir détruit ou endommagé l’objet.

Ainsi peuvent se voir des personnalités excessivement masochiques, dans l’autosacrifice, le dévouement extrême et une réparation sans fin.

Ce besoin de réparation peut souvent expliquer des vocations professionnelles de médecin, de chirurgien, d’infirmière ou de psychothérapeute (voir Alice Miller « Le Drame de l’Enfant Doué »).

 

Harold Searles et Helm Stierlin évoquent très bien la culpabilité terrible qui peut ronger des sujets hantés par le sentiment d’avoir « détruit » ou de n’avoir pas pu « guérir » leur mère ou leurs parents.  Nous connaissons tous des patients très « sages » ou très inhibés, qui ont eu une mère malade ou déprimée ou élevant seule ses enfants, ou des parents débordés par les problèmes d’un frère ou d’une sœur.

 

Une mère dépressive et envieuse induira chez ses enfants

 

  • Une culpabilité plutôt paranoïde suite à sa rivalité et à ses attaques envieuses ;
  • Une culpabilité plutôt dépressive suite à sa dépression, son mal être.

 

  • Criminels par sentiments de culpabilité:

 

Après tout ceci, nous pouvons revenir à l’origine des sentiments de culpabilité précoces, antérieurs à la conflictualité œdipienne et aux « criminels par sentiment de culpabilité » décrits par Freud.

 

  • Mélanie Klein insiste sur l’intensité d’une terreur paranoïde (phase schizoparanoïde) antérieure au déploiement de l’Œdipe freudien.
  • Donald Winnicott évoque une culpabilité primaire, liée à un traumatisme, à une défaillance de l’environnement antérieurs à la séparation sujet-objet, c’est-à-dire à la découverte de l’objet dans le monde extérieur.

 

Il se développe alors un mélange de honte primaire et de culpabilité primaire, avec la conviction écrasante d’être mauvais, toxique ou destructeur (voir aussi à ce propos Roussillon et Ciccone).

 

La culpabilité secondaire, elle, se développe dans une situation où sujet et objet sont distingués et séparés.

L’on retrouve alors la culpabilité liée aux pulsions, à l’agressivité anale ou à la rivalité oedipienne, mais, bien sûr, il faut tenir compte du rôle de la réponse de l’objet, de la configuration familiale et des traumatismes évoqués plus haut.

 

  • Culpabilité et Psychopathie:

 

La psychopathie a éveillé depuis longtemps un débat sur l’existence ou l’absence de culpabilité chez ces sujets.

 

  • Pour Freud, il n’y a pas de culpabilité, par absence de formation du Surmoi (mais bien sûr, pour lui, le Surmoi est conçu comme héritier du conflit oedipien) ;

 

  • Mélanie Klein, au contraire, évoque une culpabilité torturante, avec un Surmoi archaïque très sadique et une terreur paranoïde.

 

Pour se dégager de cette aporie, on doit se tourner vers Winnicott, qui ouvre une perspective moins pessimiste et plus mobilisatrice.  Pour lui, il est essentiel que l’objet survive aux attaques réelles et fantasmatiques de l’enfant.  C’est alors qu’il sera découvert dans le monde extérieur.

 

Par son activité délinquante répétée, le psychopathe serait obstinément à la recherche d’un objet qui puisse SURVIVRE.

 

Je pense ici à un patient en analyse, qui avait eu un père inconstant et laxiste, interdisant puis tolérant les transgressions.  Ce patient récoltait les amendes pour excès de vitesse, sur un trajet autoroutier qu’il connaissait extrêmement bien.

 

  • De la culpabilité à l’Ethique:

 

La réponse de l’objet à un vécu de culpabilité est extrêmement importante :

 

En présence d’un objet empathique, bienveillant, qui se montre réceptif aux désirs de réparation, la culpabilité dépressive s’élabore et se transforme en souci et responsabilité mature face à l’objet.

 

Au contraire, si la culpabilité ne rencontre aucun écho, aucune empathie, elle s’amplifie en désespoir écrasant, en impasse mélancolique, en réparation obsessionnelle ou maniaque.

 

La réponse de l’objet a donc une importance transformatrice capitale.  Il y a ainsi un continuum de la terreur paranoïde décrite par M. Klein à une culpabilité paranoïde plus tempérée (peur du gendarme et angoisse de castration chère à Freud) puis à une culpabilité dépressive avec efforts obsédants de réparation et enfin à une sensibilité réparatrice beaucoup plus tempérée.

 

La culpabilité maturative (Michaël PARSONS) ou responsabilité implique :

 

  • La capacité d’assumer que l’existence, l’autonomie, la pulsionnalité ont une dimension inéluctablement agressive, même sans intention de faire souffrir (Winnicott) ;

 

  • Le souci, la sollicitude pour l’autre, tout en acceptant qu’une réparation totale est impossible.

 

Emmanuel LEVINAS a évoqué l’importance du visage de l’autre, de la confrontation à l’altérité avec la responsabilité éthique envers l’autre que cela implique.